Le monde déviant de Brice Milan

Le monde déviant de Brice Milan

Dans le cadre de services presse, j’avais déjà lu la trilogie Les Chroniques des Terres d’Eschizath de Brice Milan, soit Les Fragments Perdus, Les Fragments Réunis et Les Fragments de Discorde. Cette série était plutôt inégale. Je m’explique. Chaque auteur a son style, comme une signature qui lui ait propre et qu’on finit par reconnaître dans ses livres, peu importe le thème ou le genre abordé. De ce fait, les forces et les faiblesses d’une œuvre sont souvent communes dans tous les tomes d’une saga. Là ce n’était pas le cas. Chaque livre avait ses bons et ses mauvais côtés indépendants des autres, ce qui n’avait pas nui à la cohérence globale de l’histoire, je vous rassure. Pour plus de détails, si vous ne l’avez pas encore fait, je vous invite à lire les critiques que j’avais écrites à leur propos. Tout cela pour dire que, lorsque l’auteur, que je remercie d’ailleurs de sa confiance, m’a invitée à découvrir un autre de ses livres, j’ai été curieuse de voir de quoi ça aurait l’air. Je viens donc de terminer Le monde déviant de Brice Milan et je vous en parle!

Le monde déviant de Brice Milan
Synopsis

Il n’est pas minuit moins une, il est minuit. Les douze coups sont en train de sonner, c’est la fin. Le monde est morcelé en cité-état. La classe dirigeante se terre dans de grandes tours, à l’abri des effets climatiques d’une terre à l’agonie, s’enfonçant dans un profond déni et la décadence. Au pied de ses tours, le reste de la population meurt lentement, étouffé par la pollution. Sam Hartley travaille pour une importante entreprise. Il se croyait à l’abri, pouvoir vivre dans le luxe, l’égoïsme et l’aveuglement. Et c’était le cas, jusqu’à ce qu’il reçoive un message par erreur. Sa vie est désormais menacée. Il est pourchassé. Sa seule lueur d’espoir? Une femme qui avait été sa maîtresse et qu’il avait condamnée à une mort assurée pour la faute de porter son enfant. Et pourtant, cette fuite vers l’avant pourrait être le seul espoir de sauver le monde…

Mon avis

Le monde déviant de Brice Milan m’avait été présenté comme un livre de science-fiction et d’anticipation. Pour être plus précise, il s’agirait plutôt d’une dystopie. Vous me direz, je chipote sur les détails. Ce qui n’est pas faux… Mais, en l’occurrence, je suis un peu là pour ça et celui-ci ne fait de mal à personne. Le livre se déroulant dans un avenir pas si lointain, le côté science-fiction n’est pas vraiment présent. On retrouve plutôt le côté sombre d’un monde en ruine avec un gouvernement très autoritaire qui forme la base d’une dystopie.

Avec ce livre, nous retrouvons la « faiblesse » que j’avais constatée dans Les Fragments Perdus, du même auteur. J’ai mis le terme entre parenthèses, parce que, avouons-le, c’est un sujet qui pourrait faire débat. Pour moi ça en est une, pour un autre, ce serait une force. Encore une fois, Brice Milan a priorisé l’action au détriment du contexte. De ce fait, le récit va parfois flirter avec l’incohérence. Attention! J’ai dit flirter, pas qu’il était incohérent, il ne faut pas confondre. Mais, quelques explications seraient de mise.

Fait intéressant, j’ai lu ce livre alors que les US, que dis-je, le monde est secoué par la mort de George Floyd. Ce drame relève d’une réalité historique. Peu importent les forces armées en présence, la technologie militaire employée, un peuple opprimé finit toujours par se dresser contre une tyrannie. Le nombre finit toujours par l’emporter, même si ça peut parfois être très long, très dur, avec des résultats mitigés. Dans l’univers créé par Brice Milan, la logique voudrait qu’un schisme se soit créé. La population en bas des tours n’avait plus rien à perdre. Ce qui la rend particulièrement dangereuse. Les Cleaners, une sorte de corps policier au service des dirigeants, ou toute autre troupe armée n’auraient pas dû pouvoir y aller aussi impunément. Ils auraient plutôt dû être sous le principe d’un fort assiégé, protégeant leurs employeurs. J’ai dit la logique… j’aurais dû dire MA logique. Parce que c’est là où le bât blesse. Un autre aurait pu voir les choses différemment parce que… Eh bien, là est le problème. Il me manque des morceaux du puzzle. J’ai l’impression que rien n’était laissé au hasard. Que cet équilibre était là pour une raison, qui ne m’a pas été racontée. De ce fait, je vois des failles que mon imagination a peut-être, probablement, créées pour remplir des vides.

Ce constat s’applique également aux personnages. Sam Hartley avait beau occupe une position avantageuse, ce n’était pas quelqu’un d’important et il avait un peu l’attitude d’un adolescent attardé égocentrique. Alors pourquoi un fichier compromettant lui a-t-il été envoyé à lui? Parce que ça ne semblait pas être juste une erreur et si ça l’était tout de même, comment avait-elle pu se produire? Et en quoi, dans la situation telle que je l’ai compris, ce fichier était-il si terrible pour provoquer une telle chasse à l’homme? Ce sont des réponses que je n’ai toujours pas. Et qui crée le petit souci qu’au premier regard, Sam a l’air un peu fadasse et peu crédible. Au second, j’avais encore cette impression qu’il était plus complexe et riche que ça… mais que je n’avais pas toutes les pièces pour reconstituer l’ensemble. Comme s’il avait été soigneusement créé à côté et qu’en ayant qu’un aperçu du résultat final, je passais à côté de beaucoup de choses. Et bien sûr, sa relation avec la mère de son enfant qui passe de : « je te chasse, va mourir, même si je le regrette un peu » à : « c’est l’amour de ma vie » n’est pas plus clair. Je trouve ça dommage, mais bon, c’est une conséquence prévisible quand on priorise l’action. Et rappelons-le, certains préfèrent ça de loin!

En ce qui concerne l’écriture, avec Le monde déviant de Brice Milan, j’ai retrouvé la plume de l’auteur tel que je m’en souvenais. Il écrit toujours d’une manière aussi simple, fluide et agréable à lire. Sa « signature » n’a pas changé. Cela dit, dans ce livre plus sombre, son vocabulaire l’a été aussi. Les termes et certaines tournures de phrases sont plus matures, dénotant sans l’ombre d’un doute que cette fois-ci, l’auteur s’adressait à un public plus adulte.

En résumé, Le monde déviant de Brice Milan est une dystopie intéressante à découvrir. Un bon livre qui ravira les adeptes de récit au rythme effréné, en particulier ceux qui seraient nostalgique du film Mad Max. Il m’y a fait un peu penser. À vous de le découvrir.


Commentaires

2 réponses à “Le monde déviant de Brice Milan”

  1. Merci, Lily, pour ta chronique, qui a le mérite de beaucoup s’interroger. Je trouve (ce n’est que mon point de vue, que tu mets pas mal en avant ce que tu penses être des défauts. Pour répondre à certains de tes questions, il faudrait que je dévoile des pans entiers de l’histoire, ce à quoi je me refuse pour préserver la surprise aux futurs lecteurs. Néanmoins, le message que reçoit Sam (le héros) et dont il n’était pas destinataire, est le fait de personnes sachant pertinemment ce qu’elles faisaient. Ce point est abordé dans le roman. C’est un choix littéraire de ne pas TROP expliquer, pour laisser au lecteur s’enflammer son imagination. Enfin, lorsque tu qualifies mon écriture de simple, je ne sais pas trop si je dois le prendre pour un compliment, car l’acte d’écrire n’est jamais « simple ». Si le résultat te parait explicite, t’en mieux, cela veut dire que la transcription de mes pensées s’est faite de manière compréhensible (et attractive?). Brice Milan

    1. Avatar de Lily Chagnon
      Lily Chagnon

      Brice, j’ai choisi mes termes avec soin et parfois, ce n’était pas évident. Je veux dire par là que j’ai dit faiblesse et non défaut. Il y a le choix littéraire, il y a la subjectivité, le ressenti. Ce qui est bien pour un, ne l’est pas pour un autre. J’ai tenté d’équilibré un peu des deux côtés, et je suis désolée si tu n’y as vu qu’une critique. Tu dis que le message a été envoyé à Sam par des personnes qui savaient pertinemment ce qu’elle faisait. Je veux bien te croire et d’ailleurs, c’est ce que j’avais compris. Mais, je ne comprends tellement pas pourquoi ils l’ont fait que j’ai été obligé d’envisager que c’était peut-être une erreur au final. Tu dis que c’était un choix littéraire de ne pas trop expliquer. Encore là, relis ma critique et tu verras que je l’avais perçu. J’ai eu l’impression que ton univers et tes personnages étaient très riches et complexes, mais qu’il me manquait trop de pièces du puzzle pour vraiment l’apprécier. Je n’arrivais pas à autant m’immerger dans l’histoire que je l’aurais voulu et j’en étais un peu frustrée. Ce n’était pas l’effet recherché, je le comprends et j’en suis désolée. Et pour finir… arg! J’ai eu un petit débat avec mon conjoint au sujet du terme « simple » avant de publier ma critique et je vois qu’au final, j’aurais dû l’écouter. Il le voyait de manière péjorative, alors que ce n’est pas du tout le cas. Il était le terme le plus adapté, dans toute sa subtilité et ce n’était pas un reproche, et je ne te parlais pas de l’acte d’écrire en soi, mais du résultat. J’aurais pu dire accessible, mais ce n’aurait pas été que ça. C’est encore plein de potentiel qui pourrait lui ajouter un soupçon de richesse supplémentaire. Il n’y a pas de phrase grandiloquente. La complexité n’est pas le texte, mais dans l’intrigue. Et comme j’ai dit, fluide et agréable à lire. Tu vois, ce n’est pas négatif.
      J’ai tenté d’être sincère et constructive. Que je doive autant me justifier signifie de 2 choses l’une, soit j’ai échoué dans mon but en écrivant cet article, soit je t’ai blessé alors que ce n’était pas mon intention. Dans les deux cas, je suis, encore une fois, désolée. Mais, pense que je n’ai fait qu’émettre mon opinion, une chose qui est très suggestive.

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